"Développement économique" - Réplique de l'AQLPA à la lettre de Françoise Bertrand
En réplique à la lettre de Françoise Bertrand, présidente-directrice générale Fédération des chambres de commerce du Québec, publiée dans le Journal de Montréal et le Journal de Québec. NOTE : L'AQLPA a soumis cette réplique aux deux quotidiens le 9 avril 2013 (à ce jour, lundi 15 avril 2013, elle n'a pas été publiée).
Comme à son habitude, Françoise Bertrand, présidente de la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) défend ce qu’elle appelle du « développement économique », mais qui n’est en fait qu’une vision étroite d’un développement industriel qui tient ses racines dans la colonisation et les manières de faire du début de la Révolution industrielle.
Dans le dossier des hydrocarbures des Îles-de-la-Madeleine, madame Bertrand ne tient pas compte de l’impact de l’exploration et l’exploitation du gaz et du pétrole sur les activités économiques existantes ; c’est la grande industrie qu’elle défend. Les problèmes que risque de poser ce type d’activité industrielle sur le secteur touristique ou de la pêche ne semblent pas faire partie de ses préoccupations. Les pertes de ressources humaines qualifiées dans les petites entreprises ne l’inquiètent pas non plus si ça peut bénéficier aux compagnies minières, gazières et pétrolières qui ont besoin d’une main-d’œuvre pour leurs propres projets sans lien avec le milieu qu’ils envahissent de façon le plus souvent cavalière, voire carrément sauvage.
Si madame Bertrand avait le moindre respect pour les régions, elle aurait un tout autre discours : parce que contrairement à ce qu’elle peut penser, il y a du développement économique qui se fait dans les régions, souvent à échelle humaine et généralement mieux intégré parce que réalisé par les gens des régions. Le ralentissement économique dont elle parle est dû en partie au fait que les projets pétroliers et gaziers sont davantage soutenus de diverses façons par les gouvernements que ne le sont les projets d’énergie de source renouvelable, qui sont pourtant reconnus pour être davantage créateurs d’emplois, et d’emplois de qualité. Dans toutes les régions du Québec, beaucoup de gens et d’organisations travaillent actuellement à des projets d’agriculture biologique mais se battent contre les géants de l’industrie agro-chimique et agro-alimentaire. C’est ça la réalité. Les membres des chambres de commerce – le plus souvent des PME et des micro-entreprises – feraient bien de rappeler à la présidente de leur Fédération qu’il existe d’autres modèles de développement économique que ceux du XIXe siècle et qu’il serait plus rentable pour le Québec de défendre un modèle qui s’intègre davantage à la réalité quotidienne des gens.
Enfin, les demandes répétées de la FCCQ pour obtenir une forme de BAPE économique est totalement ridicule puisque les projets ont déjà un biais en faveur de l’économie de marché avant même de se retrouver au BAPE : c’est le cas entre autres du BAPE sur le gaz de schiste où l’étude de la pertinence et de l’alternative énergétique a été rejetée pour mettre l’accent sur la façon dont l’industrie pouvait s’implanter. De plus, la présidente devrait suivre de plus près les dossiers de la Régie de l’Énergie puisque que ceux-ci sont traités le plus souvent sous l’angle économique et non l’angle énergétique.
Vouloir un développement économique qui tienne compte des gens et de leur environnement n’est pas de la démagogie mais tout simplement un respect profond pour la nature et ses gens. L’économie est un outil, pas une fin en soi.
Par Kim Cornelissen
Vice-présidente AQLPA