Il y a bientôt un an
Le 3 juillet 2014 - Il y a bientôt un an… la population de Lac-Mégantic a été marquée au fer rouge. Le Québec en entier était sous le choc. La nouvelle faisait la une partout dans le monde. Aujourd’hui, Lac-Mégantic commence à peine à se relever de ses cendres et l’anniversaire du terrible accident ferroviaire rallumera les blessures encore béantes chez les Méganticoises et Méganticois. Le 6 juillet 2014, le Québec et le monde braqueront à nouveau leurs phares sur cette communauté endeuillée. Les paroles, les pensées, les prières seront toutes sincères et pleines de sollicitude et mots d’espoir. La classe politique en profitera peut-être aussi pour souligner ses subventions et ajouter d’autres promesses d’aide à la reconstruction. Mais il faut bien plus que des subventions, promesses, condoléances et mots d’espoir pour honorer les victimes de cette horrible tragédie.
Dans un texte publié le 11 juillet 2013, André Bélisle, président de l’AQLPA, indiquait que cet événement devait enclencher une réflexion et une réorientation de nos priorités en matière de développement énergétique. Un an plus tard, qu’en est-il ? Avons-nous tiré les leçons de cet accident ? Avons-nous pris le temps de réfléchir à notre dépendance aux combustibles fossiles ? Avons-nous cherché à préciser un plan d’action pour nous en affranchir ?
En fait, à part quelques efforts, bien insuffisants selon nous, en matière de sécurité ferroviaire, les questions essentielles n’ont pas été abordées. L’avenir sécuritaire des générations actuelles et futures passe par un virage ferme vers les énergies de sources renouvelables et l’abandon des combustibles fossiles. La population doit exiger de sa classe politique des actions concrètes et immédiates en ce sens.
Malheureusement les sujets à l’ordre du jour sont l’augmentation du transport par train de combustibles fossiles de plus en plus dangereux (pétrole de schiste, pétrole des sables bitumineux), la multiplication des projets d’oléoduc au Québec et ailleurs, des projets d’exploration pour le pétrole de schiste sur Anticosti et en Gaspésie ainsi que le spectre du gaz de schiste qui revient à l’horizon.
De plus, les tendances passées et actuelles vont de coupures de services, incluant dans les inspections de sécurité, à l’assouplissement, voire l’abolition, de lois et règlements sur l’autel d’une austérité trompeuse et mal avisée. Des « économies » qui mènent à la tragédie sont absurdes et totalement inacceptables. Il faut remettre les humains et la protection de notre environnement au centre de nos préoccupations; l’argent et la finance au service des communautés et non le contraire…
Québécoises et québécois, exigeons un meilleur avenir pour nos enfants. Exigeons la création d’une véritable richesse qui est celle d’un environnement sain et sécuritaire pour tous.
En cette veille d’un pénible anniversaire, nous réitérons nos condoléances à chaque personne touchée par la tragédie de Lac-Mégantic.
Photo : Maximianons, 2007 - via Wikimedia Commons
La course à l’or noir et la tragédie de Lac-Mégantic
Texte d'opinion d'André Bélisle, président de l'AQLPA – publié dans le Journal Le Soleil, le 11 juillet 2013
Tout d’abord, je souhaite exprimer en mon nom personnel et au nom de l’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) nos sincères condoléances et notre sympathie la plus sentie aux familles éprouvées, aux amis bouleversés et à toute la communauté endeuillée de Lac-Mégantic.
Depuis quelques jours, beaucoup d’encre a déjà coulé sur les cendres encore chaudes du centre-ville de Lac-Mégantic, pulvérisé par l’explosion du train de la Montreal, Maine & Atlantic.
Au-delà des accusations, des supputations et des théories sur ce qui s’est passé, au-delà de la négligence de la compagnie et de la sécurité générale du transport par chemin de fer au Québec et au Canada, il y a un aspect plus global qui doit être scruté avec la plus grande attention de la part de la société civile, des gouvernements, sans oublier les médias d'information.
Je parle du rôle des gouvernements devenus promoteurs du développement accéléré et aveugle du pétrole et du gaz, sous l’influence des grandes corporations.
Malgré tous les appels à la prudence, au principe de précaution, voire même à la logique la plus élémentaire, il semble bien que nous ayons, en toute connaissance de cause, atteint et même dépassé les limites des mesures de sécurité encore applicables après des années de dérèglementation sauvage. Nous sommes aujourd’hui impuissants devant les lobbies industriels et leur cupidité toujours plus méprisante.
Déjà, les conséquences environnementales de la production de pétrole telles que le réchauffement planétaire, la destruction de la couche d’ozone, le smog et les pluies acides, ses impacts sur la qualité de l’air et de l’atmosphère ou encore la contamination des sols, des nappes phréatiques, des cours d’eau et des océans, tout cela aurait dû alerter et guider nos élus.
Mais ceux-ci ont été frappés par la fièvre de l’or noir et du gaz miraculeux, au point de leur faire perdre de vue les besoins fondamentaux de nos communautés, à commencer par la protection des populations.
Les accidents dans le transport des combustibles fossiles augmentent proportionnellement avec l’accroissement de leur production et de leur transport, que ce soit par train, par bateau ou par pipeline, et nos autorités poussent toujours plus fort en voulant doubler, voire tripler la production de pétrole et de gaz au pays.
La volonté de nourrir l’avidité des compagnies et de leurs actionnaires, et d’engranger toujours plus de revenus en taxes et impôts, a complètement aveuglé nos dirigeants.
Or cette soif pour le pétrole est d’autant plus inconsidérée qu’elle vise d’abord à satisfaire les marchés extérieurs et non les besoins des Canadiens.
Il faut donc, dès maintenant, prendre une pause, ralentir la cadence. Les populations sont exposées à des risques de plus en plus élevés. Rappelons-nous que les trains et les pipelines traversent un nombre de plus en plus important de villes et villages partout au Québec, au Canada et en Amérique, sans oublier que les ports sont souvent situés aux abords de communautés.
Il faut ensuite réduire sérieusement notre propre consommation de combustibles fossiles et passer au plus vite aux énergies vertes et renouvelables.
Nous avons un devoir de mémoire indélébile et une responsabilité collective devant la communauté de Lac-Mégantic. Il est à espérer que cette tragédie marquera le début d’une réflexion sur notre esclavage face au pétrole et l’amorce d’une transition vers une société plus verte.
André Bélisle, président
Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA)
11 juilltet 2013